Archives par étiquette : Alevtina Kakhidze
Paréidolie 2022, ces 27 et 28 août
La galerie participe à la neuvième édition de PAREIDOLIE, salon international du dessin contemporain à Marseille et vous donne rendez-vous samedi 27 et dimanche 28 août 2022 au Château de Servières. Nous montrerons des oeuvres de :
Alevtina KAKHIDZE
Jacques LIZENE
Jacqueline MESMAEKER
Benjamin MONTI
Gaetane VERBRUGGEN
Samedi 27 août : Preview (sur invitation) 9h-11. Vernissage 11h-13h . Ouverture au public jusqu’à 20h
Dimanche 28 août : Ouverture au public 11h – 20h
11-19 boulevard Boisson 13004 Marseille
Alevtina Kakhidze, Manifesta 14, Prishtina
Good as Hell. Voicing Resistance explore la voix en tant qu’extension du corps humain dans le monde et, à son tour, la condition de la politique. Lorsque nous murmurons, parlons ou crions, lorsque nous marmonnons, bégayons ou restons silencieux, lorsque nous choisissons une langue plutôt qu’une autre, modifions celles qui existent ou en inventons de nouvelles, nous définissons la nature de notre présence envers les autres.
L’exposition rassemble des œuvres d’art qui expriment une résistance aux récits de violence et d’assujettissement, lorsque ceux-ci passent de la sphère privée à la sphère publique et vice-versa. En se concentrant sur les artistes contemporains du Kosovo, du reste de l’ex-Yougoslavie et de ses voisins, elle examine les réponses aux formes d’oppression émanant des gouvernements socialistes et post-socialistes et des structures sociales patriarcales et hétéronormatives.
Deux projets d’archives situent les performances, les vidéos, les sculptures et les installations dans un contexte historique et international plus large. Chacune d’entre elles étant un dépôt de résistance à part entière, les archives attestent de la portée de la voix et du corps en tant qu’instruments de dissidence et d’insurrection, mais aussi de soin, de solidarité et de compassion.
Good as Hell. Voicing Resistance explores the voice as the extension of the human body into the world and, in turn, the condition of politics. As we murmur, speak or shout forth, as we mutter, stutter or remain silent, as we choose one language over another, alter existing ones or invent new ones, we define the nature of our presence towards others.
The exhibition brings together works of art that voice resistance to narratives of violence and subjugation, as these spill over from the private realm into the public sphere and back again. Focusing on contemporary artists from Kosovo, the rest of the former Yugoslavia and its neighbours, it examines responses to forms of oppression emanating from socialist and post-socialist governments and patriarchal, heteronormative social structures.
Two archival projects situate the performances, videos, sculptures and installations within a broader historical and international context. Each a repository of resistance in its own right, the archives attest to the scope of the voice and the body as instruments of dissent and insurrection, but also of care, solidarity and compassion.
PARTICIPANTS
Valentina Bonizzi, Haveit Collective, Astrit Ismaili, Hristina Ivanoska, Jelena Jureša, Alevtina Kakhidze, re.act.feminism, Selma Selman, Secondary Archive, Dardan Zhegrova
EXHIBITION 22.07 → 30.10.2022. National Gallery of Kosovo
Le travail de Mme Kakhidze s’intéresse désormais aux plantes. Pour elle, elles sont toujours un exemple à suivre – elle considère les plantes comme l’un des meilleurs exemples de pacifisme sur notre planète. Ses convictions contre la production d’armes – et son impact fondamental sur la société – sont au cœur de sa pratique. Elle étudie actuellement les possibilités de rompre cette chaîne de production d’armes en général, tout en tenant compte de l’existence et de la nécessité des guerres défensives/de libération dont elle est témoin dans son pays. »
Kakhidze’s work is now interested in plants. To her, they are still an example for us to follow — she views plants as one of the best examples ofpacifism on our planet. Her beliefs against the production of weapons – and it’s fundamental impact on society – are central to her practice. She is currently researching the possibilities of breaking this chain of producing weapon in general, while taking into account the existence, and need, for defensive/liberation wars as she is witnessing in her home country.”
Alevtina Kakhidze, dessins, actualité
Alevtina Kakhidze dessine quotidiennement la guerre et publie ses dessins sur Instagram et d’autres réseaux sociaux. Elle a récemment accordé quelques interviews : son témoignage sur la situation actuelle, ses réflexions, sa pratique artistique dans ce contexte tourmenté. Dessins et extraits choisis.
Une conversation WhatsApp avec Alevtina Kakhidze, transcrite par François Piron le 5 avril 2022 et publiée sur le site du Palais de Tokyo.
(…) Alevtina Kakhidze vit à la campagne, près de Kiev, depuis 2007. Dans son atelier, son travail et ses archives sont toutes emballées dans du plastique noir, prêtes à être emportées, alors qu’elle a pris, avec son mari, la décision de rester en Ukraine après l’invasion du 24 février. Si elle se sent aujourd’hui soulagée, elle ne peut néanmoins envisager le futur. « Cette guerre est une expérience incommunicable », dit-elle.
Elle fut l’une des premières à descendre dans la rue en 2013 dans ce qui est devenu le mouvement du Maïdan, et elle y restée pendant trois mois et demi. En tant qu’artiste, elle confectionnait des gilets pare-balles pour les manifestant·es qu’elle voyait démuni.e.s face à la police armée. Là, elle a vu des gens se faire tuer par la police, puis celle-ci reculer progressivement, et abandonner. « Maïdan a été notre révolution de la dignité. C’est à cette école que j’ai appris à vivre en temps de crise, à combattre l’apathie. »
Quelques mois plus tard, elle participait à la « biennale européenne » Manifesta 10, organisée en 2014 à St-Pétersbourg, au moment exact de l’annexion de la Crimée par la Russie, qui marque le début de la guerre contre l’Ukraine. « Certain·es artistes ont pris la situation au sérieux. Thomas Hirschhorn me posait sans cesse des questions à propos de la Crimée. Plusieurs personnes m’ont demandé si je comptais me retirer de l’exposition, mais j’ai décidé de maintenir ma participation. » Elle présente alors une installation et une performance intitulées “Méthode de construction d’une vérité politique”, adressant la notion de vérité en politique, à l’heure des débuts de la guerre d’information menée par le gouvernement russe.
« Maïdan a changé ma vie et m’a aidé à trouver le courage de contrôler mes émotions et de continuer à travailler. C’est comme cela que je me suis mise à dessiner à propos de l’invasion russe depuis 2014, et de nouveau depuis le 24 février 2022, dès le début de cet épisode sanglant. » « Je dessine depuis l’âge de quatre ans, et je n’ai jamais changé de style. C’est mon langage. L’académie a essayé de tordre ma main vers un style plus classique, mais dès que j’ai quitté l’école des beaux-arts, je l’ai retrouvée inchangée. » Ses dessins disent-ils sa vérité ? « Un dessin n’est qu’une perspective de moi-même. Une parmi d’autres. L’un de mes dessins, sur lequel j’avais écrit « Haine des Russes », a créé une polémique. Mais il faut comprendre que mes dessins reflètent autant ce que je pense que ce que j’entends, ce qui m’entoure, ce que je traverse. »
Les dessins d’Alevtina sont des notes mentales, des journaux intimes autant qu’un essai philosophique fragmenté qui remet en question ce qu’elle a appris de la philosophie occidentale (Kant, Hegel, Arendt) et ce qu’elle a vécu pendant la guerre. Elle essaie encore et toujours de comprendre ce qu’il s’est passé. « Comment reprocher à des gens de ne pas savoir ce qu’il se passe en Ukraine, lorsque moi-même je ne savais pas que des événements similaires ont eu lieu en Moldavie et en Géorgie ? (…) Je suis un complet produit de la culture russe, n’ayant par exemple même pas appris ma propre langue. Je me suis tournée récemment vers la littérature ukrainienne afin de comprendre ma propre culture. Aujourd’hui encore, je ne peux pas écrire en ukrainien sans faire d’erreurs. »
Il lui tarde de revenir à son travail et de pouvoir le partager. « Une grande part de mes recherches concerne l’observation des plantes, dans mon jardin mais aussi ailleurs. C’est une recherche philosophique sur le comportement des plantes natives et des plantes invasives. Les plantes ne se tuent pas les unes les autres ; elle ne s’enfuient pas non plus en cas de danger. » François Piron, Palais de Tokyo, Paris.
Sur le site AOC (Analyse Opinion Critique), cet entretien accordé au collectif Beyond the Post Soviet qui s’intéresse à un vaste espace géographique et culturel allant de l’Europe à l’Asie centrale. Depuis ses débuts, le groupe s’est interrogé, entre autres, sur l’impérialisme russe et la colonialité soviétique et sur la manière dont ils ont survécu à travers le temps et dans différentes configurations.
(…) À plusieurs reprises, vous avez souligné votre volonté de rester en Ukraine quoi qu’il arrive. Qu’est-ce qui motive votre décision, et pourquoi estimez-vous qu’il est important pour vous, en tant qu’artiste, de rester ?
Dès le premier jour de la guerre, mes amis et les institutions avec lesquelles je travaillais auparavant ont commencé à m’offrir des lieux d’hébergement dans leurs pays en paix : viens chez nous, fuis ! Je me souviens de ma réaction immédiate : cela ne résoudrait pas le problème, les Russes attaquent mon pays, ma maison, mon mari, mes chiens et mon art ! De plus, il n’est pas possible de faire sortir toute la population ukrainienne – 42 millions de personnes. Je pourrais recevoir une bourse et un appartement, mais qu’en est-il des voisins de mon village qui ne parlent même pas anglais ? Ma décision de rester en Ukraine équivaut à un concept pour une œuvre d’art sur le pouvoir : fuir signifierait que je suis faible alors que le jeu vient juste de commencer. Les Russes veulent-ils me tuer (au moins me blesser) ou me coloniser ? Ont-ils besoin du territoire ukrainien ? Ils en ont pourtant tellement en Sibérie… Maintenir la décision de rester en Ukraine, de ne pas partir, est toutefois plus difficile en pratique que ce que j’avais pu imaginer. Chaque jour je me questionne, et de plus en plus à mesure que j’entends des bombardements près de chez moi. Je me suis déjà habituée à l’idée que je pourrais être tuée. Maintenant, je travaille sur la peur d’être blessée… Que reste-t-il d’autre ? Être colonisée par les Russes ? Nous sommes en guerre avec la Russie depuis 2014 et j’ai eu le temps de me séparer d’eux – je suis habituée à avoir la chair de poule quand j’entends leur accent russe.
Votre pratique artistique est ancrée dans votre vie quotidienne, vos rituels, votre routine, ainsi que dans votre imagination et votre analyse des événements et des systèmes de pouvoir. Vos récents dessins, performances, vidéos et installations témoignent également de la guerre, qui a commencé en 2014 et s’est poursuivie le 24 février, avec l’invasion russe. Pensez-vous que votre pratique artistique a évolué ?
Pas du tout. Il n’y a qu’une seule différence avec l’époque de Maïdan et les huit premières années de la guerre en cours, pendant lesquelles j’ai aussi beaucoup dessiné et créé de nombreuses œuvres : à présent, j’ai juste peur de perdre Internet. Si je compare Maïdan et la guerre de 2014 au 24 février, mes œuvres examinaient alors de plus près les opinions polarisées sur certaines questions internes de la société ukrainienne. Par exemple, ma mère n’a pas soutenu Maïdan et certains de mes amis proches en Ukraine ont critiqué cette protestation de longue durée. Mais aujourd’hui, la société ukrainienne est plus unie que jamais, alors que l’Occident est polarisé sur les questions relatives à l’Ukraine, et notamment le sujet de la responsabilité collective russe. Je suis consciente de ce sur quoi j’ai travaillé par le passé et de ce sur quoi je travaille maintenant.
Vos dessins quotidiens, que vous partagez sur les médias sociaux, constituent un journal qui nous donne beaucoup d’informations de première main sur la situation dans et autour de l’Ukraine. Il devient une source d’information en soi. Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans cette tentative d’atteindre les gens et de communiquer avec eux par ce biais ?
En fait, il n’y a pas de difficultés, c’est même un privilège de traverser ce type d’événement incroyablement difficile avec la capacité de réfléchir à travers l’art. Cela donne une énergie pour vivre. C’est comme percevoir et créer cette nouvelle réalité simultanément. La réalité ne dépend qu’en partie de moi, que j’aie peur ou non. Hier, c’était mon anniversaire et je plaisantais en disant que les bombardements étaient des feux d’artifice qui m’étaient destinés. Toutefois, en mettant de côté l’ironie, j’ai l’opportunité de vérifier tous les concepts développés dans la culture actuelle : qu’est-ce que l’égalité des sexes dans une guerre contemporaine ? Comment travailler sur une haine énorme ? Comment en définir les contours, quelle place pour la xénophobie et d’autres choses encore ?
Votre travail a beaucoup à voir avec le langage et l’écriture, mais aussi avec les non-dits de l’histoire. Quelles sont les histoires de l’Ukraine qui ont été réduites au silence pendant trop longtemps ? La question de la langue russe n’a pas été suffisamment considérée. Comme l’« excuse » du Kremlin pour la guerre déclenchée en 2014 était de protéger la population russophone du Donbass, de nombreux Ukrainiens se sont forcés à passer du russe à l’ukrainien en public. Je l’ai fait aussi. Mais ma langue maternelle est le russe, ce qui fondamentalement pour moi, comme pour une artiste-performeuse travaillant avec des textes, constitue une perte de mon instrument principal – mon ukrainien n’est pas parfait, mon anglais est encore pire, je suis une personne sans plus aucune langue maternelle. Mais ce n’est pas la situation politique contemporaine qui a créé ce piège pour moi. Ma grand-mère parlait l’ukrainien comme langue maternelle, et la colonisation de l’Ukraine par l’Union soviétique a conduit ma mère – et moi par la suite – à parler le russe au lieu de l’ukrainien. Cela fait 4 ans que je travaille sur un texte portant sur la langue russe. Je ne l’ai pas encore terminé et je ne suis pas sûre qu’il sera publié.
Vos biographies sur internet vous décrivent souvent comme une artiste à l’identité multidimensionnelle. Dans quelle mesure cette définition provient-elle de vous, et si c’est le cas, quel sens lui donnez-vous ?
Je pense que la trajectoire de chaque personne, surtout son enfance, influence le reste de sa vie. Oui, je connais bien le Donbass où je suis né et où j’ai grandi. J’ai beaucoup visité la Géorgie parce que mon père est géorgien, je vis à Kiev depuis 1995 et j’ai connu la vie occidentale grâce à mes études aux Pays-Bas. Comment cela peut-il être lié à la situation actuelle ? À Maastricht, une tante de mon propriétaire, une vieille dame sympathique, m’a invitée à regarder un film sur un tsar russe, bien que je n’aie cessé de répéter que je venais d’Ukraine et non de Russie : je pouvais être une bonne compagnie mais à la fois une outsider.
(…)
Quelle forme de solidarité attendez-vous et de qui voulez-vous qu’elle vienne ?
J’aimerais vous inciter à imaginer, construire et rêver d’un nouveau système dans lequel le pouvoir considérable de politiciens comme Poutine pourrait être retiré par un mécanisme clair dans n’importe quelle partie de notre planète. Je sais que c’est assez ambitieux. En entendant des bombardements à l’instant et en écrivant ce texte, j’ai encore assez d’énergie pour croire que le Projet de paix perpétuelle écrit par Emmanuel Kant au 18e siècle pourrait être mis en œuvre par les humains. Vous pourriez avoir raison de me soupçonner d’être malhonnête. Si vous saviez que juste après j’allais transférer mon propre argent pour l’armement des forces ukrainiennes contre les Russes. Je pourrais encore me permettre de rêver d’un nouvel espace comme celui que nous avons depuis la Seconde Guerre mondiale pour construire de nouvelles institutions, de nouvelles règles et de nouveaux principes afin d’exister sans armes, c’est-à-dire sans guerres. J’ai besoin de solidarité dans ce domaine. En restant en Ukraine, je me comporte comme une plante. Les plantes ne fuient jamais quand il y a un danger devant elles. Elles sont bien meilleures que les humains et les animaux dans toutes ces questions de pacifisme, elles ont beaucoup d’avance sur nous. Elles se reconstruisent de manière à être partiellement blessées, me rappelant ma peur… Les plantes pourraient se reconstruire encore et encore, elles n’ont pas les mêmes organes que nous. Je ne rêve pas de reconstruire nos corps humains dans 100 ans, mais nous pouvons imaginer les institutions et leur fonctionnement comme des systèmes végétaux. Si vous n’avez pas ce type de pensée, nous devons admettre que les humains tous ensemble, quel que soit l’endroit où ils se trouvent, sont toujours des monstres militaires et qu’ils s’attendent à une guerre de temps en temps ici et là.
Un entretien accordé à Monopol Magazine le 28 fé »virer 2022, en allemand, et traduit en anglais par Kajet Digitial.
PHILIPP HINDAHL: What is the specific position of an artist in this conflict?
ALEVTINA KAKHIDZE: Look, of course this is a moment to rethink the power of artists. We’ve been doing this since the political crisis of 2014. We had the revolution—or, to be more accurate, a long protest, the Euromaidan, which took three and a half months. People lived in tents, it resembled the Occupy camps in New York, except it was winter and it lasted longer. Afterwards, when the president fled the country, in February 2014, 3500 people were injured. I was among the artists who visited people in hospitals. And I was drawing the stories of the Maidan participants. At the time, it was important for Ukrainians to break the Russian propaganda narrative that protesters were marginal, and all from Western Ukraine. Now we have a harder situation—real war. Some artists react to it through their profession, as cultural workers. For example, a friend of mine draws with kids in a Kyiv subway station, which is a bomb shelter now. Some of my colleagues are paralyzed and do nothing, or they try to leave the country. Some of Kyiv’s artists never visited East Ukraine, and that’s why they are shocked by this level of violence—they need time. Ukrainian artists are as diverse as its society.
PHILIPP HINDAHL: You are from Eastern Ukraine yourself?
ALEVTINA KAKHIDZE: I was born in the region of Donetsk. I wanted to become an artist, that’s why I left my small hometown. All my family was or still is there. I know the situation very well. I saw a shift in who was considered Russian. I grew up with a Russian cultural background, and I speak Russian. But during the war, I separated myself from all that is Russian and it was a painful process.
PHILIPP HINDAHL: I’d like to go back to the Maidan protests, because you also made art about that, and you mentioned drawing. Do you see this as a possibility to react to current events?
ALEVTINA KAKHIDZE: For me, drawing is the key to accepting reality. When I saw the first barricades at Maidan, I was crying. It was clear that there will eventually be violence. I started to draw barricades. Through drawing I understood that this is a collective thing. I went through each detail. But then, my art is conceptual. For me, at the time, the most important thing was how to change somebody’s thoughts about something. During Maidan, people in the area that I’m from—and even my mother—were against the protest.
PHILIPP HINDAHL: You addressed these complex issues in your work at Manifesta in St. Petersburg, in 2014.
ALEVTINA KAKHIDZE: I received an invitation for Manifesta 10, which took place in Russia in 2014—at the time of the annexation of Crimea and when the war started in the Donbas. It was an opportunity: I had a huge budget and a lot of time. Here, I didn’t draw, I invented a performative dialogue. People, in Russian, on stage, would ask me controversial political questions. For instance, to whom does Crimea belong? Why do you speak bad Ukrainian? What happened in Odessa? Who is the perpetrator? 48 people were burned in a building in Odessa, and it was connected to the protests of 2013/14. It was a complicated story. Most of the victims were pro-Russian protesters, and for my artist friends from Odessa, it was terrible in spite of their pro-Ukrainian stance. Sometimes, you can’t know the truth, or find out who is responsible for a tragedy. For the Manifesta project, I tried to ask 20 difficult questions. Once you hear the question, it is clear that your answer will turn you into an enemy or a friend. I had three positions from which to answer, and they were completely different. I tried to show the nonsense of “truth”. Later, I offered a lot of workshops in Eastern Ukraine, where I experimented with this performative format. I asked more questions, for instance: are you for decommunization or not? One of the actions at Maidan was to demolish Lenin statues. There are people on the extreme right who demolished—sometimes beautiful—Lenin statues. The Lenin statue is not a statue, it is something else, it has another meaning. And this is the key: understanding that sometimes metaphors can be broken.
PHILIPP HINDAHL: What is your situation now?
ALEVTINA KAKHIDZE: My friends in Europe try to help me by offering me their homes. But that doesn’t solve the problem. They can host me, but they can’t bring all of my country. I can come, I don’t need a visa. I can take a train from Lviv. But for me, to provide a portrayal from above, as an artist staying here, is also valuable. There are many wars all over the world, and the Russian-Ukrainian war is one of them. I’m staying in Ukraine to understand what is happening. Without that, I can’t produce work. But I can’t say that every Ukrainian artist should behave like this.
PHILIPP HINDAHL: It is frustrating to watch. Now, the West threatens sanctions, and they are very foreseeable. But Putin knows there will be no further consequences, probably.
ALEVTINA KAKHIDZE: At the moment I’m reading about the 17th-century idea of perpetual peace, proposed by Immanuel Kant. He suggests that we can imagine a peace that is not fragile, but perpetual. Yesterday, we started to write to people from Moscow, asking them to donate money to help the Ukrainian army. They said, we don’t want this, we are against the war. They want to protect peace—which I can understand—but they also want to protect themselves from financing war. But how else can we stop the war in Ukraine?
PHILIPP HINDAHL: Is this a question of morality?
ALEVTINA KAKHIDZE: If you read philosophy, morality is always questioned. Only totalitarian regimes believe in morals as something solid. You and I, for example, have similar ideas, but they could also be shifted. You can choose to be like the Dalai Lama, or you can be ready to fight. Choices always exist.
PHILIPP HINDAHL: What do you mean?
ALEVTINA KAKHIDZE: When I was at Maidan, other artists were also there. Some of them started throwing stones. I didn’t. But, the next morning, after Yanukovich fled the country and Maidan was victorious, I understood something: if everyone had been like me, Yanukovich wouldn’t have fled. When can you allow yourself to be a pacifist? Ukraine is in this very interesting situation where you can test many of these concepts. But right now I’m a Ukrainian artist. I sit in my studio and we talk about philosophy—even if I can hear the shelling. I’m so curious to see what the end of this will be.
PHILIPP HINDAHL: What will it be?
ALEVTINA KAKHIDZE: The question is, what is Putin’s goal? He likely wants to replace the government in Ukraine, or he wants to change our political agenda, so that our president just signs anything the Russian regime demands. This would affect me as well as all the people in Europe.
PHILIPP HINDAHL: You talked about the eight years between Maidan and now. What happened to the idea of a new beginning?
ALEVTINA KAKHIDZE: You see, I made visualizations for a survey in the occupied territory. They asked questions about how people see themselves, with whom they’d like to be, and what their attitude towards the Ukrainian government is. They interviewed 600 people and needed illustrations, so I got the job. One question was, if you had three wishes, what would they be—but people had only one: they wanted the war to end. If you lack imagination, it doesn’t give you any hope. My friends from the EU suggest only one thing: come to us.
PHILIPP HINDAHL: I think that is understandable.
ALEVTINA KAKHIDZE: A lot of my neighbors are also scared. But I am against the idea of having just one solution. In Ukraine, in the occupied territories, there is only one wish, not a second, not a third.
PHILIPP HINDAHL: But when there is peace, much more is possible.
ALEVTINA KAKHIDZE: Imagination has to do with education. I believe in education, and this is why I work with children. When you are in a post-Soviet society, sometimes you can’t think. This is about freedom, and this is related to our situation. Ukrainians are very creative. But politicians are not that creative, and this makes me think about Joseph Beuys, about being an artist in politics. I was inspired by his exercises for my work with children in this village.
PHILIPP HINDAHL: Beuys also has a connection to Ukraine.
ALEVTINA KAKHIDZE: He was injured in Crimea, but he invented a story about the Tatars who saved him. Which is interesting, because they were persecuted in the Soviet Union.
PHILIPP HINDAHL: Do you think he cared about Tatars?
ALEVTINA KAKHIDZE: No, of course he didn’t care. But he was smart. He didn’t say the Nazis or the Soviets saved him. He looked for the exotic, with the fat and felt.
PHILIPP HINDAHL: How do you think the next week will look in Ukraine?
ALEVTINA KAKHIDZE: We will see how strong the Ukrainian army is, and how far Russia wants to go. There may be a roundtable with politicians, and it will map the future, and not just Ukraine’s future. But I can’t really say. I don’t have data about how much equipment there is, or how big the Russian army is. On our side, we hear a lot of heroic stories. Like the one about the defenders on the island in the Black Sea, who refused to give up by saying “Russian warship, go fuck yourself”. People share this on social media. Maybe the clawing spirit of all Ukrainians can help us, maybe not. I cannot give you a prognosis. My only answer is, this will not be a story about Ukraine, but about the whole world.
Art Rotterdam, les images (1)
Alevtina Kakhidze, Art Rotterdam preview
Alevtina Kakhidze, Imagine Ukraine, Muhka, Antwerpen
IMAGINE UKRAINE
28.04–21.08.2022
L’Europe doit accorder plus d’attention à l’Ukraine, à son caractère tangible et à sa complexité, à ses opportunités et à ses possibilités. Notre compréhension commune doit s’accroître. Imagine Ukraine est une réponse ambitieuse à cette situation. Elle veut renforcer l’espace de réflexion avec une perspective à long terme, vers l’avenir.
Imagine Ukraine est une initiative du PinchukArtCenter et du M HKA, développée avec la participation de BOZAR et du Parlement européen.
Trois expositions sont prévues dans le cadre d’Imagine Ukraine, rassemblant des œuvres d’artistes ukrainiens appartenant à la collection de la Communauté flamande et présentées à BOZAR, au Parlement européen et au M HKA. Cet espace sera complété par une série d’événements, avec des documents de référence, des débats, des projections de films et un programme éducatif pour les enfants réfugiés. Le projet comprend également une plateforme web en anglais, néerlandais, français et ukrainien.
Au Muhka la première de ces trois expositions rassemble des œuvres de Victoria Begalskaya, Sergey Bratkov, David Chichkan, Nikita Kadan et Alevtina Kakhidze. Un programme vidéo présentant des vidéos de jeunes artistes ukrainiens a été conçu par le PinchukArtCenter, avec Yarema Malashchuk et Roman Himey, Daniil Revkovskiy et Andriy Rachinsliy, Dana Kavelina, Nikolay Karabinovych et Jan Bačynskyj ; et avec un nouveau dessin mural d’Anna Scherbyna.
Art Brussels 2020 preview, Alevtina Kakhidze
Cette suite de dessins, intitulée « J’écris à son propos, à propos des fraises d’Andreevna », rend compte de la vie quotidienne à Jdanivka, une ville minière de l’oblast de Donetsk, en Ukraine, ville où est née Alevtina Khakidze. Alevtina vit aujourd’hui dans la banlieue de Kiyv, mais sa mère est restée à Jdanivka, jusqu’à son décès en 2016, s’occupant de son jardin, ultime rempart contre la guerre.