Archives mensuelles : septembre 2024

Sandrine Morgante, Bourgeois buiten, Lichtekooi, Antwerpen, vernissage ce 21 septembre

The works of Sandrine Morgante (b. 1986 in Liège, lives and works in Brussels), which deal with writing and speech, are visual transcriptions of dialogues from interviews, audio recordings of nocturnal thoughts, or memories of spontaneous conversations.  With the new project Walen bourgeois buiten, Morgante approaches political influence and historiography using a fragment of Belgian history. Besides the well-known slogan “Walen buiten”, Morgante takes an interest in the lesser-known slogan “Bourgeois buiten”, which places the language conflict within a class struggle. Through printed maber, drawings and a publication, Morgante reflects on how political ideas are communicated and disseminated. This exhibition is not taking place in a Belgian election year for nothing!

Les œuvres de Sandrine Morgante (née en 1986 à Liège, vit et travaille à Bruxelles), qui portent sur l’écriture et la parole, sont la retranscription visuelle de dialogues issus d’interviews, d’enregistrements audio de pensées nocturnes, ou de souvenirs de conversations spontanées. Pour le nouveau projet, Walen bourgeois buiten, Morgante aborde l’influence politique et l’historiographie à partir d’un fragment de l’histoire belge. Outre le slogan bien connu « Walen buiten », Morgante s’intéresse au slogan moins connu « Bourgeois buiten », qui inscrit le conflit linguistique dans un conflit de classes. À travers des imprimés, des dessins et une publication, Morgante réfléchit à la manière dont les idées politiques sont communiquées et diffusées. Cette exposition n’a pas lieu en pleine année électorale belge pour rien!

The Times They are A-changin’

« Walen buiten » : le slogan a signé jusqu’à le désigner un moment de l’histoire sociale et politique belge. Celle du mouvement étudiant à Louvain, entre mai 1966 et mai 1968, qui conduira in fine à la scission de l’Université de Louvain en deux entités linguistiques distinctes : l’une, néerlandophone, demeurant dans l’implantation l’origine ; l’autre, francophone, ouverte en 1972 dans une ville créée pour la cause, Louvain-la-Neuve. Mouvement porté par des conceptions et des organisations nationalistes, mais dont la réduction au mot d’ordre « Walen buiten » voile les complexités et contradictions internes, autant que les mutations politiques et intellectuelles dont il constitua le ferment.

Une génération s’est formée et conscientisée en son sein, en particulier un groupe qui y a vécu une radicalisation révolutionnaire, partant de conceptions démocratiques et anti-autoritaires assez diffuses pour élaborer progressivement un programme pétri de marxisme, de tiers-mondisme, de solidarité avec le mouvement ouvrier. De ce groupe naîtront les fondateurs d’AMADA – TPO (Alle Macht Aan de Arbeiders – Tout Pouvoir aux Ouvriers), qui deviendra, en 1979, le PTB / PVDA. C’est un moment de cette mue que saisit Sandrine Morgante, la traduisant dans la transformation imprimée au titre : « Walen buiten », non plus. Bourgeois buiten désormais. Ce moment est celui de l’éclosion : après une première expérience en mai ’66, un petit groupe de « gauchistes » décide de mettre la main sur le très respectable hebdomadaire étudiant intitulé Ons Leven. Cette feuille est imprégnée de conservatisme et de nationalisme. Eux sont anars, inspirés par les Provos hollandais, nourris d’une contre-culture en pleine expansion, fascinés par le mouvement des droits civiques aux Etats-Unis, révulsés par l’emprise de l’Eglise sur la vie et l’enseignement, étouffés par l’autoritarisme ecclésiastique et académique… Entre fin septembre ’66 et début mars ’67, ils s’emparent de Ons Leven, le transforment, dans les textes, les images, la forme. Le révolutionnent. Le graphisme s’anime et s’arrondit, les textes s’ensoleillent de désirs et d’insolences, l’horizon s’élargit aux luttes des Noirs Américains, des Indonésiens. S’invite le mot « révolution », la date de 1917.

Et c’est cela qui éveille Sandrine Morgante, sollicite ses préoccupations propres : comment le support imprimé se fait l’acteur et aujourd’hui le témoin d’une transformation collective des consciences aussi bien que d’une diffusion d’idées nouvelles. Idées, à savoir : formes, couleurs, verbe, langage. Dès lors, la matière : d’abord un témoignage de première main, l’entrevue avec un acteur des événements, à savoir Herwig Lerouge, étudiant alors en philologies germaniques, devenu ensuite l’un des vecteurs de cette transformation, puis militant indéfectible, acteur de la fondation d’AMADA-TPO, puis du PTB-PVDA. C’est Herwig Lerouge qui fournit à Sandrine Morgante cette archive précieuse des numéros de Ons Levenphagocytés. C’est lui encore qui fournit cette page du quotidien Het Laatste Nieuws du 15 novembre 1967, une entrevue avec divers leaders du mouvement étudiant en cours (parmi lesquels lui-même, mais encore Paul Goossens, Ludo Martens, Kris Merckx…). Cette page témoigne de l’écho médiatique – très ponctuel – donné aux débats internes traversant alors le mouvement étudiant, entre volonté d’unité, questionnements de l’accès à l’enseignement universitaire et de la démocratie, élargissement à des enjeux sociétaux plus vastes (l’emprise des trusts et du Capital sur l’enseignement, le lien avec le mouvement ouvrier).

De cette matière éclot ceci : les numéros de Ons Leven sont compilés en un volume de facsimilés. Une édition où Sandrine Morgante intervient de deux manières : elle dépouille les numéros de toute publicité et de tout élément non politique. Par ailleurs, elle inscrit dans les pages des dessins sommaires, sous forme de cartoons politiques sommaires, sans style. Dessins et caricatures évoquant les luttes et questions de notre temps : la Palestine, l’écologie, les luttes sociales. Manière de prolonger et d’actualiser le geste d’appropriation qui était celui de cette rédaction pirate du périodique. Manière d’affirmer une filiation et une continuité. D’autre part, la page de Het Laatste Nieuws est agrandie et sérigraphiée, barbouillée, souillée, maculée d’aplats mouvants, libres, « pop », floraux, expansifs et invasifs. Sur ces aplats, des phrases manuscrites reprennent des fragments de l’entrevue avec Herwig Lerouge. Elles attestent d’un subjectivité personnelle et collective en pleine floraison, autant que d’une véritable stratégie de diffusion.

L’écriture simule celle du témoin, cherchant à réincarner l’expérience comme son souvenir et son actualité. Comme dans d’autres travaux, l’exercice de l’écriture est celui d’une présence charnelle, formelle, graphique[1]. Les mots, la pensée s’éprouvent. Ils s’agencent dans une conflictualité visible, entre l’archive officielle et le témoignage marginalisé par l’histoire. L’ensemble des sérigraphies s’agence dans une composition murale, évoquant l’esthétique du mur d’affichage sauvage, du « placard ». Au total, ça « s’envague » , s’ensauvage, entache, énonce cette énergie d’une conscience en mouvement, d’une floraison d’un jeune âge en attente, entachant l’ordre présent de ses désirs débordants, des rigueurs à venir. Ce bruissement, cette attente, ce mouvement, sans doute est-il aujourd’hui en cours sur d’autres supports que la feuille. Mais on le touche ici, dans l’assurance d’une filiation et d’une école possibles. Dans la sensation vive que toujours les consciences s’avivent…

Laurent Courtens (critique d’art)

[1] Cette capacité comme cette nécessité mimétiques habitent d’autres travaux de Sandrine Morgante, par exemple lorsqu’elle simule et réincarne les écritures d’écoliers dans l’ensemble Taalbarrière  (2021) ou dans Figliie dei Militari (2019).

Craigie Horsfield, les images (4)

Craigie Horsfield, les images (3)

At the carnival at Palma de Campania the February air was bitterly cold and as the light faded in the late afternoon a biting wind came up across the slope of the volcano. On the last day of the celebration groups of dancers and performers, several hundreds of people from different districts of the town, compete with each other in showing the costumes they have laboured on for months. In that winter, young men and women shivering in the cold trooped onto the stage excited and expectant as the last stragglers from the performance before were leaving. First one group then another would emerge from the press of figures to dance to the front of the high platform they stood on while their supporters in the crowd belocheered and shouted as they recognized their friends. In the intervals, as one group left and the next prepared to come on, the guest of honor was presented, a television starlet who stepped petulantly from her limousine into the cold to wave apathetically to the crowd as the MC extolled her fame over a megaphone, before she retreated, with evident relief, surrounded by fawning men vying to catch her attention, to take refuge again in her car. She was gone long before the last troupe of performers were being ushered on. The four young women were the first of their party, hesitant as they were pushed on to the stage to stand ready and watchful. Several other figures in extravagant costume danced on to take their positions but there was a pause. There was some confusion as those waiting to go on to the stage were being redirected and others were brought from the line that stretched into the shadows beyond the steps up to the platform. The young women became anxious and uncertain whether to stay in their allotted place, so exposed to the gaze of the crowd. There was a sense of the waiting figures, the young women in their now hesitant boldness and expectancy, being at a point of fragile equilibrium in which they appeared as though spectral, both older and younger than they were, caught between what had been and would not be again and that which was to come, that which was already forming and certain … but delayed, leaving them as though in suspension, irresolute, unable to leave, or to go on. The cold wind cut to the bone, and everywhere there was busy disorder, around the stage and amongst the crowd, but here only the movement of their white dresses as they stood swaying back and forward. And one dancing. (Craigie Horsfield)

Aglaia Konrad, Shapes, Hung, Heaped, Vi Per gallery, Prague

Aglaia Konrad est l’invitée de Vi Per gallery à Prague en Tchéquie. Vernissage de l’exposition Shapes, Hung, Heaped ce 17 septembre 2024

VI PER Gallery focuses on architecture in the broadest sense, together with its relations and points of intersection with contemporary art, urbanism, design and media, as well as the political, legal, social, economic and ecological contexts which help to shape architecture and the built environment. The exhibition’s topics explore social issues in a broader sense and their relationship with architecture and art. Our objective is to highlight the great potential that architecture and art have within society and to generate topics that represent new connections and impulses. VI PER Gallery thus provides space for interdisciplinary research and discussion. Part of the gallery space is a bookstore focused on architecture.

Fracture(d), ville fragmentaire, ville fragmentée signifie (brisée) Et nous pourrions continuer ainsi : Hell, Help(full), Her city, c’est-à-dire l’enfer, help(n), sa ville. Ou encore Rot, Rückbaukristalle, ville en ruine, ville en ruine, ville en ruine. Ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses associations de mots faites par l’artiste Aglaia Konrad en réponse à l’environnement urbain dans lequel nous nous déplaçons quotidiennement.1 Nombre d’entre elles sont également évidentes dans l’installation qu’elle réalise actuellement pour la galerie VI PER.

Dans ses photographies, films et installations, Aglaia Konrad fait souvent référence à l’architecture, à l’environnement urbain et à l’espace en tant que tel avec une grande intensité. En photographiant l’architecture, l’espace urbain et l’infrastructure, elle a affiné son point de vue sur toutes les particularités inhérentes qui sont nécessairement associées à la conception, à la construction, mais aussi à la démolition et à la nouvelle construction. Plus récemment, elle s’est intéressée à la relation entre la destruction (de bâtiments d’après-guerre ou de quartiers entiers) et la reconstruction ou la nouvelle construction qui se produit sur le site. Elle s’intéresse plus particulièrement à ce que l’on appelle le Rückbau (processus de construction inversé) qui conçoit « la démolition comme un aspect inévitable du progrès ». Le Rückbau en tant que processus sculptural est une approche par laquelle l’artiste comprend la démolition comme une pratique architecturale étendue, impliquant des déchets de construction physiques en tant que geste sculptural en relation avec l’image. Le terme Rückbaukristalle, mentionné dans l’introduction, combine à la fois la démolition, la disparition et la croissance (les cristaux grandissent, se réarrangent).

Pour l’exposition de Prague, Aglaia Konrad a préparé une installation composée de fragments – éléments architecturaux de façades, de structures ou de mobilier – de bâtiments démolis qu’elle a collectés au cours de ses voyages à Bruxelles. Cette installation est accompagnée d’une série de photographies. (Curator: Irena Lehkoživová, Barbora Špičáková)

Craigie Horsfield, les images (1)

Benjamin Monti, Le petit musée du bizarre éphémère, Oyou, Marchin, 15 septembre – 9 octobre

Benjamin Monti participe à l’exposition Le petit Musée du bizarre éphémère, au centre culturel de Marchin et à la galerie Juvénal à Huy. Commissaire : Manu d’Autreppe. 

Benjamin Monti, dessin pour le livre « Bestiaire du cinéma » d’Hervé Gauville,
encre de chine sur papier, 29,7 x 21 cm, 2024 

Communiqué :

L’art actuel — dans toute la diversité de ses expressions, qui finalement ne renvoient à rien de bien précis — se retrouve bien souvent, délibérément ou malgré lui, pris dans un tourbillon de questionnements voire d’incompréhensions, de débats voire de controverses. Celles-ci ont souvent trait à la « valeur » de l’art, ou de telle œuvre en particulier. S’il n’est pas question de son prix, on se demande alors « d’où ça vient et où ça va » (et c’est donc la question de son sens qui se voit posée), ou encore de ce qui attribue et distribue la reconnaissance, la légitimité, la visibilité (ou simplement la lisibilité). Que veut-on me dire, ou d’où vient cette chose étrange ? Où est le moche, où est le beau ? De qui se moque-t-on, et ne ferais-je pas mieux ? Qu’est-ce qui distingue l’artiste professionnel de l’amateur ? Et même, l’artiste de l’artisan ? Quelle est la part de la maîtrise et quelle est celle du hasard, quelle est celle de l’intention ou de l’impulsion, dans le cas d’une réussite comme dans celui d’un « échec » ? Est-ce bien moi qui ai fait cela — sinon, qui ?! Est-ce que je garde ou est-ce que je jette ? Pire : est-ce que j’offre, ou est-ce que… je prête — par exemple dans le cadre d’une exposition, une exposition comme, par exemple, celle-ci !  Que d’interrogations autour de ces formes et de ces apparences, qui toujours nous dépassent et nous échappent, se marient bien ou mal, vivent leur vie propre, petite ou grande destinée. Ces objets sont parfois sans objet, ces sujets semblent demeurer sans réponse, du moins sans réponse nette et définitive, sans réponse meilleure que par l’exemple et la confrontation, la plus libre possible. Car enfin tout est, si l’on en croit les plus courantes conclusions, question de contexte et de sensibilité, question de point de vue et de rapprochement (voire de rapprochement des points de vue), question somme toute de goûts et de couleurs, dont on n’en finit pas de ne pas vouloir discuter.  Eh bien, parlons-en ! Depuis plusieurs semaines, les portes d’un appel à propositions se sont ouvertes, à double battant (Marchin, Modave Clavier et alentours, d’une part, mais aussi Huy et les environs, d’autre part) et en vue d’une exposition en deux déclinaisons, l’une à Oyou, l’autre à la galerie Juvénal, à Huy, en collaboration avec la Fondation Bolly-Charlier. La récolte est en cours et l’aboutissement dépend encore de vous, qui avez jusque début août pour nous soumettre vos propositions ! Outre la joie de découvrir, en bout de course, un cabinet de curiosités copieusement nourri et fort varié, l’exposition espère, sans se prendre au sérieux, avec gourmandise et modestie, de coups de cœur en coups de bluff en coups de génie, apporter sa contribution au désordre des idées. En outre l’exposition s’inscrira, à Huy, dans le cadre du parcours d’artistes qui cette année suivra le fil, certes un peu emmêlé, « des fêlures et des fêlés ». 


Benjamin Monti, dessin pour le livre « Bestiaire du cinéma » d’Hervé Gauville,
encre de chine sur papier, 29,7 x 21 cm, 2024 

Craigie Horsfield, une courte notule d’introduction

La galerie Nadja Vilenne est particulièrement heureuse d’accueillir Craigie Horsfield, figure majeure de l’art contemporain britannique. Généreuse, l’exposition rassemble une sélection d’œuvres réalisées entre 2005 et 2016, autant de jalons des projets menés par l’artiste à El Hierro (Tenerife) et dans le sud de l’Italie, à Naples, Via Monteoliveto et via Chiatamone par exemple, à Sorento ainsi qu’à Palma de Campania, autant d’approches du réel transcendant les lieux évoqués car, oui, en ces fascinantes dramaturgies, tout est réel ici.

Diplômé de Saint Martin’s School of Art à Londres en 1972, Craigie Horsfield se tourne rapidement vers la photographie, le cinéma et le son. Il quitte la Grande-Bretagne pour des raisons politiques la même année et part vivre en Pologne. Pendant sept années et y suit des cours d’art graphique à l’Académie des Arts de Cracovie, ainsi qu’à l’Académie des Sciences puis choisit de devenir DJ. C’est dès 1969 que Craigie Horsfield commence à réaliser des photographies en noir et blanc. Ses clichés – paysages, portraits d’amis ou de proches, nus ou encore scènes d’intérieurs – restent confidentiels pendant une dizaine d’années, Horsfield choisissant de ne les publier qu’à la fin des années 1980. Ses photographies, par leurs grands formats, convoquent la peinture classique. Elles renouent avec l’idée de tableaux. L’usage de la lumière semble trahir une volonté de dramatisation. Et pourtant,  Horsfield décrit bel et bien des lieux et des gens à travers ses titres et manifeste ainsi une authentique intention documentaire. Elle interroge à la fois l’art et la vie, le familier et l’extraordinaire, l’épique et le quotidien, le temps lent et long du présent qui garde trace du passé et amorce le temps à venir. Craigie Horsfield s’est longuement interrogé sur cette question de la temporalité, s’inspirant des écrits Fernand Braudel, fondateur des Annales, pourfendeur des premières réalités mouvantes qui font trop de bruit, défenseur d’un temps long prenant en compte une triple temporalité, celle d’un temps géographique, d’un temps social et d’un temps de l’événement.  La réalisation d’une œuvre, que ce soit son tirage, sa contemplation ou son effet émotionnel, s’effectue dans notre espace commun, se déroule dans un présent relationnel, déclare Craigie Horsfield. Mon expérience m’a confirmé, encore plus clairement, dans mon idée de la permanence de l’histoire, dans l’idée que ma propre culture ne faisait qu’un avec celle des siècles précédents. La photographie, précisément, peut prendre en compte cette conception. C’est ce qui la rend inconfortable, dit-il encore.

L’exposition s’articule sur plusieurs temps. Celui d’une dramaturgie solennelle, Procession Blanche et Procession du Christ Mort à Sorrento, relationnelle dans ce bar de la Via Monteoliveto à Naples, festive et carnavalesque Piazza de Martino à Palma de Campania. Celui de l’atemporalité d’une nature morte, bouteilles, ail, grenades, pivoines de la Via Chiatamone à Naples, certaines délicatement imprimées a fresco. Celui, enfin, de la nature et des paysages, un temps suspendu et minéral à El Hierro, un tumulte sur la baie de Naples, vue depuis la Via Partenope, ce jour où, coïncidence étonnante, s’enflamme un bateau alors que, plus loin, la foule admire les éclats d’un feu d’artifice. Pendant un instant, il a semblé que le monde s’était ouvert à une autre époque, car tout ce qui était familier était englouti, écrit Craigie Horsfield. Comme la peau du présent est parfois fine, tendue et presque transparente. Et sous cette peau, l’obscurité turbulente.

 Nommé au Turner Prize en 1996, Craigie Horsfield a notamment été invité lors des Documenta X (1997) et XI (2002) à Kassel, à la Biennale new-yorkaise du Whitney en 2003. Nombreuses sont les institutions qui lui ont consacré une exposition monographique parmi lesquelles la Fondation Antoni Tapies à Barcelone (1996), le Stedelijk Museum d’Amsterdam (1992), le Musée du Jeu de Paume à Paris (2006), le Museum of Contemporary Art de Sydney (2007), la Kunsthale Basel (2012)  ou encore la Tate Britain (2017). En Belgique, le Muhka lui a consacré deux expositions en 2010 et 2018. Craigie Horsfield a également mené deux projets collaboratifs en Belgique à BOZAR (1997) et au Museum Dhondt-Dhaenens à Deurle avec Paul Robrecht and Erik Eelbode (1996-97).  On retiendra également la double exposition organisée en 2016 et 2017 par le MASI, Museo d’arte della Svizzera italiana, à Lugano et le Central Museum d’Utrecht. Ces deux expositions ont donné lieu à la publication d’une importante  monographie, Of the Deep Present.

Jacqueline Mesmaeker, A Public Affair, Cloud Seven

Jacqueline Mesmaeker participe à l’exposition A Public Affair, Oeuvres de la collection Frédéric de Goldschmidt, sous commissariat de Bayo Hassan Bello à Coud Seven, Bruxelles. Du 12 septembre 2023 au 29 mars 2024

Jacqueline Mesmaeker, Les Charlotte

L’exposition soulève des questions sur les espaces que nous utilisons souvent, tels que les églises, les terrains de jeux et les cinémas. Sont-ils vraiment publics ou appartiennent-ils à la sphère privée ? L’exposition examine également la manière dont les personnes et les communautés naviguent dans des systèmes plus vastes tels que le travail, la propriété et l’économie. Enfin, elle réfléchit au contrôle que nous exerçons réellement sur nos pensées et nos actions lorsque nous sommes confrontés aux règles et à l’autorité de ceux qui détiennent le pouvoir.

A Public Affair, organisée par Bayo Hassan Bello, présente des œuvres de Helena Almeida, Reza Aramesh, Éric Aupol, Younes Baba-Ali, Aline Bouvy, James Casebere, Laurie Charles, Aleskandra Chaushova, David Claerbout, Margaret Courtney-Clarke, Tacita Dean, Dries Depoorter, Romuald Hazoumè, Jan Henderikse, Hideyuki Ishibashi, Sven ‘t Jolle, Kapwani Kiwanga, Maria Kley, Michel Mazzoni, Jacqueline Mesmaeker, Terrence Musekiwa, Sophie Nys, Camille Orso, Michael Patterson-Carver, Carmen Reátegui, Hiroshi Sugimoto, Barthélémy Toguo, Isaac van Nikelen, Nico Williams, Ulla-Stina Wikander, Wiktoria Wojciechowska et Yunyao Zhang.

Heures d’ouverture : du mardi au vendredi, de 14h00 à 18h00. Ouvert le samedi en septembre et octobre 2024. Dimanche 15 septembre : ouvert pour le week-end Rendez Vous. Vendredi 20 septembre : visite guidée avec le commissaire d’exposition à 19h00.

 

Benjamin Monti, l’oeil trompé, E.C.C de l’E.C.C.

Benjamin Monti participe aux expositions inaugurales de l’Espace Constantin Chariot, installé à Bruxelles, dans l’ancien bâtiment ATOMA construit en 1924,  vaste complexe industriel de 4000 m² qui vit naître le célèbre cahier à roulettes et feuilles détachables du même nom. L’oeil trompé occupe l’Espace Carnets de croquis (ECC) de l’Espace Constantin Chariot (ECC). 

Benjamin Monti – Dessin de la série « Perspecta », encre de chine sur papier, 29,7 x 21 cm, 2010.

L’OEIL TROMPÉ

Pour sa première exposition, l’Espace Carnets de Croquis (ecc), département spécifique de l’Espace Constantin Chariot (ECC), s’ouvre à trois imaginaires qui ont pour dénominateur commun d’emmener le visiteur dans une gymnastique de l’œil, qui se joue des codes et des outils de la représentation. Ce jeu désarçonne le spectateur. Le premier regard sur l’œuvre purement figurative fait naître un second regard. Ce mouvement rétinien, fait basculer le spectateur vers l’abstraction subtile d’un monde onirique et enchanteur. Il retrouve ainsi la joie de l’enfant et le plaisir d’un œil vierge, débarrassé des codes et des conditionnements socio-culturels.

– Appliquant à son art pointu du portrait les ressorts propres de la caricature, Denis De Rudder trompe l’œil du spectateur, qui en vient à douter des codes établis de la représentation. 

– Benjamin Monti, à l’encre de chine, redonne vie à des papiers imprimés -d’origine très diverses – qu’il collectionne. L’artiste nous invite, à travers ses séries “Perspecta” et ”Courage-Organisation”, dans une intimité où le réel est englouti par les lois du rêve.

– La relieuse Lola Roy-Cassayre crée des “objets-carnets” au départ des dessins de Lionel Vinche. Par le carnet, elle enferme, elle cadre, elle découpe, elle refuse l’accès, elle compose avec des morceaux choisis révélant ainsi une approche nouvelle de l’œuvre de Lionel Vinche. Par là-même, l’artiste trompe à nouveau notre œil en faisant du carnet une création à part entière, un objet design inédit.