Le 26 octobre 1977, Jacques Lizène écrit à Ben Vautier qui, à Nice, prévoit de l’exposer :
« D’abord le titre, écrit Jacques Lizène. Peinture d’un artiste “analiste” (sans Y), être son propre tube de couleur (mars 1977). Ce n’est pas mon tout dernier projet, mais j’ai décidé de le réaliser car je le trouve de plus en plus drôle. Je sais que Manzoni a mis de la merde en boîte avec le nom de différents artistes mais a-t-il peint avec ? Je sais que Spoerri a fait de l’eat-art mais a-t-il déjà fait le rapport entre la nourriture et la matière fécale (c’est-à-dire composer une gamme de couleurs en faisant le rapprochement entre les aliments et la couleur obtenue) ? Je sais que dans le Psychart, il y a eu des cas de peintures réalisées en partie avec de la matière fécale mais pas de manière raisonnée. Cette forme de peinture entraînera un type de réflexion bien connu dans le monde de l’art : “Ce que fait untel, c’est de la merde.” C’est de cette façon que le fait humoristique sous-jacent à cette démarche se révélera. Il y aura dans la peinture analiste différentes variantes : sociologique, humoristique, provocatrice, analytique, politique, coloriste, dont le tout sera “sans importance”. »
Cette exposition ne se fera finalement pas. Jacques Lizène montre sa première toile à la matière fécale quelques mois plus tard, à Bruxelles, au Jardin Botanique ou Jacques Lennep, animateur du groupe CAP, organise une exposition : Le Jardin, Lectures et Relations. Le grand aplat de merde que Jacques Lizène y montre disparaitra à la fin de l’exposition, vraisemblablement jeté par une femme d’ouvrage.
Au vernissage, qui se déroulera en présence du Régent, Jacques Lizène fait engager un musicien, un joueur de bombardon et le charge de s’asseoir dans un coin de l’exposition, sur un pot de WC. Durant la soirée, le musicien jouera de son instrument « sur tempo lent, de telle sorte que les sons émis ressemblent à d’énormes pets ».
En 1979 -80, Jacques Lizène reprendra cette idée afin d’en faire un projet de sculpture nulle pour gros tuba, pot de WC et fumée. Il s’agit de déposer un gros tuba, ou un bombardon, sur un pot de WC, de mastiquer les bords du pavillon de l’instrument sur la cuvette et de glisser dans celle-ci un tuyau relié à un générateur de fumée (peut-être un système de music hall, précise le Petit Maître afin de faire fumer le dispositif par l’embouchure de l’instrument de musique. Le tout doit être éclairé par un spot de lumière rouge. Ce projet de sculpture nulle, Jacques Lizène vient de le réaliser en 2011, avec un hélicon et non un bombardon, posé sur un WC anglais. Œuvre élégante, Jacques Lizène n’hésite pas à la poser sur sa tête.