AGLAIA KONRAD
SHAPING STONES
Aglaia Konrad, Escalier, béton brut, photocopies, impression jet d'encre, 220 x 300 cm, 2008
Aglaia Konrad, Undecided frames, double slide show, 160 diapositives, 4 projecteurs. Ed 3/3. 2007
Aglaia Konrad, série Shaping Stones, 2007-2008
Digital print, archival inkjet print, 144 x 95 cm
Aglaia Konrad, Stone Bridge
Technique mixte, 2008
Aglaia Konrad, Spherical House, Fleurus, 8 photographies couleurs, 38 x 55 cm, 2008
Aglaia Konrad, Sculpture House, 2007
Installation, film, paravent.
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Aglaia Konrad, Sculpture House et Conversation : C'est sa maison, c'est ma maison, 2007. Installation, 15 min. Film sur DVD, CD audio, livret
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C’EST SA MAISON,
C’EST MA MAISON
© Aglaia Konrad, 2007
Le pavillon de Barcelone ou la maison sur la cascade, ces espaces flottants avec la fluidité, le non contact, l’harmonie des espaces purs, c’est vraiment la même chose ! C’est très proche et Bruce Goff, c’est la suite de Frank Lloyd Wright et il était très ami avec un autre allemand et Éric Mendelsohn de la tour de Einstein à Postdam.
On s’est rencontré sur le plan de la recherche. La recherche scientifique qui a pour but de comprendre et de connaître, la recherche artistique qui a pour but d’exprimer et de créer. Mais c’est la même démarche.
FR: Ce que je trouve extraordinaire après coup c’est qu’on ait rencontré Roulin qui devient sculpteur, qui fait tout ça, Greisch qui est un jeune entrepreneur et Gillet qui est un esprit très particulier, il y a eu une rencontre. Voilà quand ça s’est fait, on ne s’est pas rendu compte vraiment ; on l’a fait comme ça avec beaucoup de naïveté et si on n’avait pas la naïveté, on ne le faisait pas.
JT: Tous ce qu’on a décrit maintenant on pourrait dire c’est une sculpture?
FR: Habitée!
JT: Voilà.
Deux conversations entre:
Wim Cuyvers (architecte) et Jacques Gillet (architecte de la maison) et
Joëlle Tuerlinckx (artiste) et Félix Roulin (sculpteur)
Félix Roulin: Jacques Gillet, cette collaboration c’est loin. C’est loin dans le temps. Et à l’époque où j’ai fait ça, j’étais au point de vue artistique en transition entre toute une expression abstraite. J’ai fait de la sculpture abstraite et au moment où on a travaillé sur cette maison, j’ai basculé dans un retour vers la figure etc. Mais avant, j’étais dans des volumes abstraits, des constructions, tout un vocabulaire tout à fait abstrait, et l’architecture était assez proche. Dans les sculptures que j’ai faites par la suite et que je fais toujours, il y a toujours deux aspects: un aspect de structure abstraite et des éléments humains qui apparaissent comme dans une maison.
Jacques Gillet: Voilà le séjour est ici, le hall est tout petit; le hall est tout petit pour ne pas perdre de place. Des choses très précises que mon frère demandait, quand on entre, être à la fois déjà dedans et invité mais toujours..., mais toujours dehors. Ceci est invitant, invitant à aller dans les trois directions principales: séjour, le niveau famille et là-bas le niveau des parents.
La pièce centrale qui communique avec tout, c’est la cuisine.
Ici, on prend la lumière du nord, mais on a un regard sur l’entrée aussi, mais un regard pour pouvoir voir mais pour pas être vu. Alors là au-dessus, il y a une lumière qui vient d’une autre orientation et qui adoucit la courbe là-bas.
Il y a un noyau central et le noyau central c’est: penderie, couture, petit coin ici, et toutes les fenêtres sont coupées ici. Toutes les fenêtres principales, du bureau, de la penderie et de la chambre sont coupées ici. Vous verrez de l’extérieur, ce volume-là très refermé et coupé ici comme l’ouverture d’un télescope.
Ici c’est le seul endroit où il y a des cloisons rajoutées. Il n’y a pas de cloison nulle part. Ce sont les seules.
Le contraste de la matière est très vivant. Le sculpteur a eu l’initiative de cela. Et c’est un des apports principaux du sculpteur avec lequel j’ai travaillé: Félix Roulin, vous le connaissez de nom, hein ?
FR: C’était une expérience passionnante parce que tout d’un coup, on faisait une sculpture de 23 m de long sur 15 avec des matériaux que je ne connaissais pas: le béton projeté, lui non plus ne connaissais pas. Donc il y a eu toute une élaboration de la technique, une mise au point. Et c’était passionnant, c’était une découverte de travailler à cette échelle-là.
JG (et son frère): L’escalier sculpture ou l’escalier Roulin..., mais tout est Roulin, toute la maison est Roulin. On a travaillé la main dans la main entre le débat fonctionnel avec mon frère et et le débat formel avec Roulin. Ma formation d’architecte ne permettait pas d’aller aussi loin; je le voulais mais c’est comme ça que je me suis associé avec Roulin. Et on s’est rencontré à une convergence d’intentions, Roulin et moi. Lui voulait trouver une justification fonctionnelle à sa sculpture. Et moi, je voulais trouver une expressivité libre. Assez fort, je trouve.
JG: On a pris ça et on a construit le bâtiment autour, c’est comme les meubles. Les radiateurs, on sait bien ce qu’il y avait, les tuyaux, vous avez vu comme les tuyaux passent ? On savait bien que tous ces espaces allaient permettre la circulation de ces choses très visibles.
WC: Mais je peux imaginer que beaucoup d’architectes essayeraient de cacher tout ça.
JG: C’est une erreur. Imiter une forme ancienne avec une technique nouvelle, les colonnes en fonte avec les imitations de feuille d’acanthe sculptées dans la pierre, c’est une erreur. Horta n’a plus fait ça: il a pris le feuillage et il l’a tordu.
Une synthèse des arts, voilà, l’art absolu; l’art total imaginé déjà bien avant le Bauhaus. Harald Szeemann est venu parler en Belgique de l’art total et il a fait une belle leçon aux étudiants en disant: Au Bauhaus, il y avait la tendance Johannes Itten, spiritualiste, il y avait la tendance Gropius, un fonctionnaliste, et les fonctionnalistes ont gagné.
Le Gropius de Harvard, c’est beaucoup plus sensible. Attention ce bâtiment a été relativement classique, moins audacieux que ceux de Kahn , qui étaient aussi un classique, mais un classique fort sculptural. Tandis que Gropius, ça restait des choses dans un parallélépipède rectangle mais avec des très beaux rythmes, et une très belle échelle humaine, et des matériaux naturels. Non, il a évolué, là, c’était plus le Gropius du Bauhaus. Mies Van Der Rohe est resté très pur, de plus en plus. C’est quelqu’un d’extraordinaire. J’ai vu un film sur Mies Van Der Rohe fait par sa fille. Et là on voit vraiment à quel point c’est un artiste jusqu’au bout des ongles ; et d’ailleurs quand il a immigré aux États-Unis, il a disparu pendant quinze jours, on ne savait plus où il était. Il était chez Frank Lloyd Wright.
JG: Il y a un autre chose aussi, c’est important, l’échelle, l’échelle des arbres..., il y a 36 échelles dans la nature..., il y a pas une échelle humaine ou pas humaine. Les anciens savaient manipuler les grandes échelles humaines. Le fait de faire de grands bâtiments à l’échelle des cathédrales, c’est à l’échelle humaine. On a perdu ça dans l’architecture contemporaine. Autrement dit, l’architecture contemporaine doit réinventer toutes ces choses qui existaient mais dans un langage nouveau. Mais le langage tel qu’il a été propagé par les années d’après-guerre, surtout dans la production de masse, a supprimé, balayé tout ça. C’est comme les feuillage et les branches ce sont deux langages différents ; toute la ramure d’un arbre c’est un volume, c’est une forme et les branches c’est une autre forme. On a ça aussi ici dedans. Il y a le plein, le vide, la ligne, le point. Basic course Bauhaus. Mes professeurs étaient Bauhaus et très “la plastique pure”. Très enthousiasmant. Et j’ai pris leur leçon mais en partant dans d’autres directions mais c’est leur leçon. C’est une architecture pure comme ils voulaient dans le Bauhaus faire un art pur et intégrer l’art et l’artisanat et l’industrie.
WC: Mais il y a l’espace pur dans le bâtiment.
JG: Mon maître spirituel, Bruce Goff, a parlé d’architecture absolue - c’est un mot dangereux - mais dans son esprit, c’est comme la musique absolue, la musique pure. Jean Sébastien Bach c’est de la musique pure. Elle est sa propre fonction.
WC: Mais ce qui est fort dans cette maison c’est le fait que dans cette architecture, vous êtes tellement à l’aise que vous pouvez avoir des radiateurs, des meubles, des choses qui n’étaient pas conçues pour ce bâtiment. C’est ça qui est à l’architecture. Et on a vraiment travaillé la main dans la main d’un bout à l’autre de la conception, jusqu’au bout du chantier.
Du point de vue expression formelle, on a cousu et recousu maintes et maintes fois jusqu’à obtenir vraiment quelque chose de satisfaisant. C’était faisable uniquement sur place et le sculpteur venait. Et à la fin, il disait: “J’ai plus besoin de venir tu es devenu aussi sculpteur que moi”. (...)
Extrait de l'oeuvre sonore :
Aglaia Konrad, 2007
C'est Sa maison, c'est ma maison
CD audio, livret